RIEN A CIRER DU SARCO (PHAGE)

Deux Civale sinon rien
Deux Civale sinon rien

 

 

 

 

 

 

.... tous au Carré,

semblent-elles dire.

 

 

 

 

 

 

 

Départ à l'heure dite de La Franqui et arrivée, en avance sur l'horaire, en région valentine: voilà le cadre parfait d'une halte gourmande. Il fait frisquet sur la rive ardéchoise du Rhône et la visite au sarcophage du notable Alethius, Gallo-romain mort au vème ou vième siècle, ne passionne que moyennement mes compagnes de voyage. Christine a déjà posé devant le tombeau et sa fille ... a faim.

 

Nous retournons sur nos pas et c'est Benjamin qui nous accueille en premier au Carré d'Alethius, suivi bientôt par Olivier et Stéphanie Samin. Je vous ai déjà recommandé plusieurs fois cet établissement chaleureux et ce fut pour Christine et moi un plaisir de le faire découvrir à "la petite" (plus d'1,70 m quand même). Nous avions réellement sympathisé avec le sommelier de la maison qui est parti à présent vers d'autres aventures et la rencontre avec M. Forestier, son successeur, nous a fait découvrir un passionné de ... syrah. On peut plus mal tomber qu'à Charmes-sur-Rhône dans ce cas. Or, avant de revenir faire son cursus hôtelier en France, et sa formation en sommellerie, notre homme a passé sa jeunesse auprès de ses parents qui travaillaient ... en Pologne. Je suppose donc qu'il est également expert en bières et en ... Wodka. En tout cas, il a apprivoisé le vignoble français, je peux le confirmer.

 

Vous savez que je n'en fais jamais des tonnes en décrivant nos menus. Celui du Carré, le "carré" justement, nous a permis de découvrir  un oeuf "couleur jaune d'oeuf", le croirez-vous? Cette composition de jaune (si si) associe les saveurs d'un oeuf "nature" et ... je vous laisse découvrir le reste. Le plat est bien dans l'air du temps, en tout cas dans l'esprit de beaucoup de nos clients. Je suppose que cela traduit un peu aussi nos préférences. En effet, dans la mesure où nous proposons nos vins en direct, sans passer par un "commercial", c'est en quelque sorte la personnalité de Christine qui détermine la sélection. Et cette quête du produit vrai - car même les oeufs de qualité exigent une recherche de la part des cuisiniers à présent* - nous habite. Par contre, la réalisation du plat signe de manière indéniable la patte d'Olivier Samin. Je n'aime pas les journalistes qui "m'expliquent" mes vins, et encore moins "ce qu'ils feraient à ma place". Je pense qu'ils élaboreraient surtout une piquette ou même du vinaigre, mauvais en plus. Mais j'ai eu l'occasion de dire modestement au chef comment moi, personellement, je ressentais sa cuisine. Il semblait d'accord avec cette perception. Tout chez lui concourt à conférer une texture veloutée à ses compositions. Chaque assiette arrive à un niveau d'harmonie presque lisse, sans heurt ni brisure, tout en conservant les saveurs de chaque ingrédient. Il ne vous livre pas une image brute des goûts, mais comme un condensé savoureux. C'est beaucoup de travail, à chaque fois, mais aucune prétention. On sort de table en se disant qu'on a mangé quelque chose qu'on ne saura jamais réaliser soi-même. Et c'est le but d'un repas au restaurant: un pavé de Salers avec une béarnaise de qualité, de bonnes frites ("à la belge" bien sûr) et une laitue croquante, avec un rien de cresson, on en profite aussi bien chez soi et j'adore cela également. 

 

En plat principal, nous avons eu le plaisir de déguster de la volaille de Bresse. Le suprême se glissait goulument sous une sauce au Vin Jaune très onctueuse mais aérienne néanmoins, tandis que la cuisse, désossée, se présentait comme un confit au curry léger. Et les légumes, céleri, châtaigne ... , se déclinaient aussi à la douce. Toujours cet aspect crémeux. Du "poulet au vin jaune", me direz-vous, comme à Saint-Amour (en Jura), à Arbois ou à Poligny. Oui, mais non. J'adore d'ordinaire ce plat, même quand il est un peu extrême, quand la volaille très rustique disparaît sous l'acidité du jaune et sous le gras opulent de la crême fraîche; même quand la morille vous emballe tout dans du papier cadeau rouge et doré. Mais ici, d'une part la viande est exquise et garde une tendreté incroyable, d'autre part les arômes oxydatifs du vin sont à peine évoqués et les légumes - notamment la polenta de châtaigne - s'inscrivent aussi dans cette sérénité. Parfois, certains plats vous emballent par leur "clash", par des ruptures gustatives, par des oppositions. La cuisine d'Olivier Samin vous appaise par son calme, par sa sérénité: c'est bon, à sa place et on se régale de l'harmonie. 

 

Bon, ça suffit, nous n'avons pas pris de petit-déj. - Christine pique les ourlets de rideaux décoratifs pour sa fille sur la table de la salle-à-manger et cela passe avant tout - et on n'a pas fait les courses pour le lunch.

 

J'ai la dent et l'évocation du repas de Charmes me fait saliver:

"jôôô: zievere', wôtertanden, kweîle', zoebbere' ..."

 

 

 *: au sujet des oeufs, Christine m'a maintes fois expliqué que, déjà du temps où elle tenait la boulangerie avec son ex-mari,

     très exigeant sur la qualité, ils devaient surveiller attentivement leur approvisionnement en oeufs. Bien sûr, beaucoup de

     soi-disant artisans travaillent avec de la poudre d'oeuf, mais le travail des "vrais" commence par le choix des fournitures de base.

 

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